Existe-t-il des différences de pratiques en matière d’alimentation et d’éducation à la nutrition en France et au Québec ?  

En tant que nutritionniste franco-canadienne, je partage avec vous mon regard « alimentaire » et original à propos des "cousins" et de mes deux villes de coeur : Montréal et Paris.
Une question d'espace : donnez-moi de l'oxygène !
À Paris, on se marche littéralement sur les pieds et ça se traduit à travers toutes les facettes de la vie alimentaire : cuisine minuscule, petit frigo, places en terrasse serrées, marchés alimentaires bondés… Et pourtant, c’est également ce qui fait le charme de la ville lumière. À Montréal, les appareils électroménagers sont très grands. Pourtant, ils ne cuisinent pas davantage. 

Une nourriture omniprésente à Paris, mais un accès limité...
Au quotidien, à Paris, l’accessibilité à la nourriture est omniprésente : boulangeries à tous les coins de rue, boucheries, fromageries, sans compter les marchés qui s’installent de manière éphémère dans les différents arrondissements et les supermarchés et "dépanneurs" ouverts en nocturne. Les yeux, les papilles et l'odorat.... tous nos sens sont sollicités par les effluves du pain chaud ou des volailles grillées. À Montréal, les commerces de qualité existent évidemment et on trouve de plus en plus de boutiques originales, notamment sur Le Plateau, quartier Français de Montréal. A noter : l'amplitude horaire des supermarchés est plus grande à Montréal. A Paris, il est difficile de faire les courses après 20h00... 

Quand Paris joue la carte gastronomie et Montréal l’ouverture sur le monde
Au niveau gastronomie, Paris offre une belle carte. Mais comme partout sur la planète, il demeure des endroits où la nourriture est mauvaise et les plats vite-faits. L'une des forces de la France se mesure au nombre de boutiques indiquant fièrement «Meilleur ouvrier de France»... des boulangeries, aux chocolateries en passant par les restaurants étoilés du Guide Michelin. Ce genre de démarche est plus récente à Montréal et l’empreinte gastronomique reste encore fraîche. Les efforts sont visibles et on trouve d’excellentes tables qui n’auraient pas à rougir face à Paris. Montréal a également ce petit quelque chose d’ouvert sur le monde qui nous donne une gamme de restaurants et un type de gastronomie WorldFood très cosmopolite.

En termes de diversité des produits, y a-t-il match ?
La diversité des produits est évidemment très grande à Paris et en France en général grâce à la promotion du terroir. Quand on compte tous les vins et fromages régionaux ! Le Québec évolue sur ce terrain là, à petits pas, et plusieurs produits de haute qualité existent aussi. Les fromages québécois percent de plus en plus sur le marché, les vins et cidres de glace sont désormais réputés à travers la planète... sans compter les "canneberges" et le fameux sirop d’érable !

La nutrition au Québec et en France, quelles différences ?
Au plan de la nutrition, les messages nutritionnels "quantitatifs" (riche en / pauvre en) sont plus présents au Québec. La population a-t-elle pour autant  une meilleure connaissance des composants de l’équilibre alimentaire ? La profession de diététiste-nutritionniste est structurée autour d’un ordre professionnel, l'OPDQ, gage de sérieux. En France, cuisine et gastronomie sont très valorisés... Les québécois mangent-ils mieux pour autant ? Les Français prennent-ils du poids ? Ce sont de vraies questions qui se posent. Le travail, pour les nutritionnistes évoluant en France at au Québec, consiste à réduire le fossé existant les professionnels de santé, les chefs, les entreprises pour travailler davantage ensemble. Cela est possible ! En témoigne la remise du Prix Benjamin Delessert à Michel Guérard, Chef 3 étoiles, 5 toques au Gault et Millau, de l’hôtel-restaurant Les Prés d'Eugénie (Eugénie-les-Bains, Landes) lors d'un colloque scientifique en 2016. Michel Guérard disait ce jour là : « La voie est enfin ouverte, me semble-t-il, une révolution sereine et légitime, d’utilité publique est en train de s’opérer, accordant à cette cuisine française... de s’inscrire, dans le XXIème siècle, pour y interpréter, avec à propos, son nouveau rôle-citoyen d’auxiliaire de santé. »

Le mois de la nutrition au Québec, une initiative durable
À l’initiative des nutritionnistes du Canada, chaque année depuis plus de 30 ans, le mois de mars est « Le mois de la nutrition » à l’échelle du pays. En mars, les nutritionnistes deviennent des ambassadeurs de l’alimentation pour le grand public. Objectif ? Diffuser une information crédible à la population pour les aider à faire les bons choix d’aliments. Une nouvelle thématique originale et d'actualité est définie chaque année. Le thème « Bien manger de 9 à 5, préparez chez vous, emportez avec vous » (photo) a permis de transmettre des messages autour de l’importance de mieux s’alimenter dans l’environnement de travail en 2015. En 2017, la thématique "Mettez fin au combat avec les aliments" faisait le point sur les idées reçues en nutrition face à la surabondance d'informations véhiculées sur la toile.  

Résultat ? Match nul !
Une chose est certaine, qu’on soit à Montréal ou à Paris, l’alimentation occupe une place centrale dans nos vies et nous devons veiller à adopter de bonnes habitudes alimentaires sans avoir à se restreindre… Et pour les excès en calories, une marche hivernale à -15°C au Mont-Royal ou alors une  promenade à vélo sur les quais de Seine aideront à maintenir le cap de l’équilibre de chaque côté de l'Atlantique !